Pensée bienveillante pour guérir la violence domestique.
Je bénis mes sœurs soumises à la brutale violence de maris qui au fond d’eux-mêmes se méprisent tellement qu’ils extériorisent cette haine d’eux-mêmes sur des partenaires souvent sans défense. Je les bénis dans leur courage à faire face aux tempêtes et leur inspiration à chercher des solutions constructives.
Je les bénis dans leur image d’elles-mêmes afin qu’elles puissent résister la tentation de la perte d’estime de soi ou de se sentir victimes de leur situation.
Je bénis les partenaires responsables de cette violence afin qu’ils se guérissent de la profonde dissatisfaction intérieure, peut-être le rejet ou la haine d’eux-mêmes et le manque d’empathie qui seuls peuvent conduire dans la voie sans issue et le cercle-vicieux de toujours plus de violence. Pierre Pradervand
SUPPRIMER LA VIOLENCE CONTRE LES FEMMES ‘ TABLE-RONDE RUBAN BLANC. GENEVE, MERCREDI 29 NOVEMBRE
www.ruban-blanc.ch
Pierre a participé à cet événement et nous partageons ses remarques sur ce site car c’est un problème mondial et la bénédiction a un rôle important à jouer si nous voulons effectuer un changement profond du niveau de conscience de toute notre planète.
Il est grès difficile de traiter du thème que je dois aborder aujourd’hui sans un minimum de recul historique. En effet, l’inégalité entre les sexes et la violence qui s’en est suivie ont des racines profondes dans l’histoire et la culture, ce qui explique la survivance de certaines idées et pratiques comme le mythe de la supériorité masculine, le racisme, certaines croyances et pratiques religieuses et j’en passe.
La violence contre les femmes semble avoir démarré dans les premières sociétés agricoles, contrairement aux sociétés de chasseurs et cueilleurs où, pour autant que les paléontologues le comprennent, l’égalité des sexes était la règle.
Cette violence s’est fortement enracinée dès la création des premières cités et des premières apparitions de structures étatiques. En Occident, selon l’historienne américaine Vivian Fox, trois corps de pensée ont façonné cette croyance à la supériorité masculine : la théologie judéo-chrétienne, la philosophie grecque, surtout Aristote, et la pratique juridique des pays de l’Europe occidentale que les Anglo-saxons nomment « common law. »
En effet, il est fondamental de saisir que cette violence a des racines culturelles fort anciennes très profondes et, qui ont façonné notre culture pendant des millénaires. On ne peut donc s’en débarrasser d’un coup de baguette magique.
Et ici, il est essentiel de définir brièvement ce qu’on appelle les formes-pensée collectives qui nous influencent à notre insu et à longueur de journée. On peut dire que toute croyance sociale collective constitue une forme-pensée. Le patriotisme en est un exemple, le racisme un autre, tout comme la croyance au paradis, ou dans un au-delà après la mort. Certaines sont positives, d’autres sont négatives, et tous naissent de milliers de personnes à qui on a inculqué une certaine croyance -comme par exemple la supériorité masculine pendant des millénaires. Ces formes-pensée peuvent être extrêmement puissantes et agir à leur insu sur les gens.
L’acceptation pendant des millénaires de la croyance patriarcale en la supériorité de l’homme et donc l’infériorité de la femme ont créé une forme-pensée qu’on peut comparer à un brouillard omniprésent mais invisible et qui a profondément imprimé, et à leur insu, le psychisme des femmes comme des hommes. Cette mémoire psychique culturelle comme l’appelle Fox continue à influencer
chez nous les croyances et surtout les comportements sociaux et individuels malgré les transformations sociologiques et historiques en cours. Ainsi, « renforcé par l’idéologie et des pratiques culturelles patriarcales, le psyché culturel continue à s’accrocher a de vieilles croyances même quand les circonstances ont évolué » (Fox).
Dans un si bref exposé, je ne vais pas rentrer dans le débat pourtant passionnant sur la naissance du modèle patriarcal basé sur des mythes ahurissants comme celui d’une Eve tirée des côtes de l’homme et devenue l’alliée de Satan, représenté par le serpent dans la Génèse, pour faire trébucher ce pauvre Adam – modèle formulé cela va de soi à 100% par des hommes. Je renvoie les intéressées à Fox et de nombreux autres auteurs. Je mentionnerai simplement à titre d’illustration sur les sommets – ou plutôt les abîmes – où cette idéologie nous a conduits, à savoir les pratique anglo-saxonne du « bridle » : une cage en fer qu’on posait sur la tête de la femme désobéissante avec une sorte d’aiguille qui lui transperçait la langue, et on la promenait à travers le village. Vous devinez l’effet dissuasif de cette pratique. Cela vous fait sourire – ou peut-être vous retourne l’estomac – mais si une telle violence envers la femme survit encore dans nos sociétés, c’est bien à cause de cette forme-pensée qui semble encore résider chez trop d’hommes.
Cette violence a pris d’innombrables formes dans la législation et la pratique sociale, des inégalités salariales pour un même travail à l’impossibilité pour une femme de signer un contrat sans l’accord de son mari, et j’en passe. Vous les connaissez aussi bien que moi.
Mais venons-en à l’atteinte d’une Suisse sans violence. Si l’existence et la lourdeur des formes-pensée souligne les défis immenses d’une élimination de la violence envers les femmes dans notre pays d’ici 2030, une des aspects si positifs de l’époque non seulement difficile, mais aussi exaltante que nous vivons aujourd’hui est le fait que des transformations qui autrefois prenaient des générations pourraient avoir lieu infiniment plus rapidement aujourd’hui. En effet, grâce à internet – cette variable totalement nouvelle dans l’histoire de l’humanité – permet que les idées, les slogans, les nouvelles façons de penser et de se comporter, de nouvelles croyances (pour le meilleur et le pire) se transmettent à l’échelle de la planète en quelques jours. Dans le domaine qui nous concerne – la violence envers les femmes – nous avons encore toutes en tête l’affaire Harvey Weinstein qui, en quelques semaines, a libéré une énergie de changement extraordinaire du côté des femmes, et cela à l’échelle de la planète. Un tel phénomène était peut-être encore inconcevable il y a de cela seulement 10 ans.
Je pense que dans notre pays la transformation pourrait être accélérée par la dissémination continue de quelques messages très simples, du style : « User de violence envers sa compagne? C’est l’arme des faibles. » Si nous pouvons vulgariser cette idée que la vraie force se manifeste par la retenue, non le manque de maîtrise qui conduit à la violence, cela pourrait beaucoup aider. Rappelons-nous Gandhi que la presse britannique appelait par dérision « ce petit homme à moitié nu » et qui a réussi, uniquement par un changement des consciences, à renverser l’empire le plus puissant que la planète ait jamais connu.
Einstein disait qu’un problème ne peut jamais être résolu à partir du niveau de conscience qui l’ a créé. Il est donc clair que ce ne sont pas quelques slogans, aussi forts soient-ils, qui vont inverser la vapeur. A la limite, c’est le niveau de conscience de toute une société qui doit changer pour que ces formes-pensée séculaires s’effacent. Et là, chaque individu, chacune et chacun de nous ici a un rôle à jouer. Je voudrais donc vous laisser sur cette note, car c’est un niveau où chacune et chacun de nous a un rôle à jouer, peut-être infiniment plus puissant que nous ne l’imaginons. Le grand penseur américain du 19è, William James, disait qu’il croyait totalement à ces millions de forces moléculaires mentales qui, unies, peuvent renverser les plus puissants monuments de l’orgueil humain (dont la croyance en une soi-disante supériorité masculine est un exemple patent – et aujourd’hui, face aux réalisations extraordinaires de nos compagnes dans tous les domaines – infiniment risible, aussi triste que ridicule et pathétique.)
Nous devenons de plus en plus conscients des forces mentales invisibles qui agissent dans tous les domaines. Chacune de nos pensées font partie de ces milliards de forces moléculaires qui sont déjà à l’oeuvre pour transformer notre planète et créer ce Nouveau Monde auquel nous aspirons tous – et dont nous sommes toutes et tous les architectes.