L’intégrité est une qualité de l’être. Elle consiste à s’accrocher en tout temps à son sens le plus élevé de la vérité et à sa propre vision, quel qu’en soit le coût. Elle consiste à résonner avec la fibre la plus profonde de notre être qui nous pousse à ne pas céder un centimètre de terrain, quel que soit le prestige ou l’autorité de la personne ou de l’institution qui s’oppose à nous. Et cela, non par obstination, mais à cause du courage tranquille d’une voix intérieure qui nous dit : « Ceci par-dessus tout : sois fidèle à toi-même… »
Être intègre signifie suivre à tout moment sa plus haute idée de ce qui est juste, quelles que puissent en être les conséquences, aussi solitaire que soit le sentier, et aussi fortes que soient les railleries et les moqueries de la foule et des pharisiens.
Être intègre, c’est encore « oser proclamer la vérité à tout pouvoir » comme le dit la sagesse des Quakers, quand le silence avantagerait mieux tes intérêts. C’est s’accrocher au pouvoir de la vérité quand tous ceux qui t’entourent acceptent des compromis ou prétendent : « Ce n’est pas vraiment important ». C’est rester intrépide et ferme quand les autres disparaissent dans les abris souterrains de leurs peurs et de leur timidité.
L’intégrité, c’est encore refuser de diluer son sens intérieur de la véracité, serait-ce même pour satisfaire, apaiser ou gagner l’approbation d’un bien aimé ou d’une bien-aimée.
Par-dessus tout, l’intégrité consiste à refuser de tricher avec soi-même, mentir à soi-même, ou demeurer dans la pénombre des demi-vérités. On peut mentir à d’autres, voire les tromper – et se faire pardonner. Mais quand tu te mens à toi-même, qui est là pour te pardonner ? Et après une défaite de ce type-là, qui t’aidera à te mettre debout ? Même si tu es assez ignorant pour te laisser aller à cette absurdité suprême consistant à te tromper soi-même, ta force intérieure ne quittera-t-elle pas le vaisseau de celui qui le coule volontairement de cette façon ? dans de tels moments, la grâce seule peut te sauver.
Se tromper soi-même tue le discernement qui est à la base du vrai jugement et d’un choix valable. Eviter consciemment ce que l’on sait être vrai ou se mentir à soi-même est le péché contre l’esprit qui réside au fond de chacun-e- de nous.
L’intégrité, en tant que centre le plus intime de l’essence de notre être, constitue la moelle de notre identité, la fondation de toutes nos qualités à commencer par l’amour. Elle est la trame sur laquelle nous tissons leurs textures exquises sur la tapisserie de notre existence. Pas de trame, pas de tapisserie. Quand elle est mariée à l’amour dans la danse joyeuse de celui dont l’existence est une célébration de la vie, elle forme le couple parfait.
Alors, quand les vents et les tempêtes hurlent, ou que le tentateur murmure « Un compromis est de rigueur » et cherche à nous faire éviter les défis dont nous avons besoin pour grandir et rester éveillés, tenons-nous fermement, amie, ami, quelque puisse en être le coût, à cette fontaine intérieure qu’est notre véritable intégrité – car en elle réside la vie.
(Source : P. Pradervand, La vie simple, Editions Jouvence, 1999)